Lancer un concept innovant et éthique sur un marché déjà bien établi : voici le challenge que relève Anthony Marais avec Meetserious. Il nous raconte comment il entreprend cette aventure. Bonne lecture à tous !
Qu’est que Meetserious ?
Meetserious est un nouveau concept qui souhaite revenir à des valeurs plus authentiques de la rencontre amoureuse en organisant des rendez-vous de célibataires dans les restaurants. Plus de discussion virtuelle pour faire connaissance, maintenant tout se joue au restaurant où des groupes de six célibataires (trois hommes et trois femmes) auront tout le temps d’un bon repas pour échanger et se séduire. Et le plus beau, 10% de chaque addition est reversée à l’association du mois.
Pourquoi et comment votre entreprise est-elle née ?
A la base, nous avions vraiment l’envie de créer un service innovant mais sans avoir de concept bien défini. En parallèle, certains d’entres nous étions sur les sites de rencontres à la quête de l’âme soeur. En faisant nos retours et impressions sur les différents sites que nous avions testés, nous avons tiré le même constat amer de ces services : les filles sont submergées de messages et n’ont pas vraiment le temps ni l’envie de répondre à tout le monde; l’abonnement coûte un bras et de manière générale les sites ne donnent pas vraiment envie. Malgré la kyrielle de concepts de rencontres qui naissent chaque jour, tous reposent sur le même système : discuter en ligne avant de rencontrer dans le réel. Cela manque quelque peu d’originalité et surtout d’humanité, vous en conviendrez. Du coup, l’idée de construire notre propre plateforme de rencontre a commencé à germer. Le marché étant extrêmement concurrentiel, il nous fallait apporter un vent neuf sur un secteur qui commence à s’essouffler.
Nous nous sommes donc réunis pour cogiter au concept. Après des heures de réflexion autour d’une table, nous sommes parvenus à centraliser nos idées pour se focaliser sur la rencontre réelle. Il ne nous fallait plus qu’un endroit pour réunir nos célibataires. L’idée du restaurant n’a pas mis longtemps à suivre. En effet, quoi de mieux pour instaurer une bonne ambiance qu’un repas partagé ? Nous avions notre concept : une plateforme qui s’affranchit de la discussion en ligne pour réunir des groupes de célibataires qui auront tout le temps d’un repas au restaurant pour apprendre à se connaître. Nous avions résolu le problème de l’authenticité : une rencontre réelle est forcément plus naturelle qu’un tchat impersonnel. Mais nous sentions qu’il manquait quelque chose pour donner à Meetserious une vraie identité. Un soir, je reçois un mail d’un de mes associés qui m’annonce qu’il a trouvé l’idée idoine pour conférer à Meetserious un univers propre :
« Et si Meetserious se distinguait aussi en reversant une partie de ses revenus à des associations? »
C’était pour nous une évidence. L’aspect éthique de la rencontre collait parfaitement avec les valeurs que nous prônons sur le site : authenticité, naturel, ouverture d’esprit et partage. Tout y est !
Quel est le plus gros challenge auquel vous avez du faire face ?
Si seulement il y en avait qu’un seul… Lorsque l’on annonce à ses proches que l’on va lancer un site de rencontre, la réaction est unanime : « Encore un ?! » Cette réaction est très parlante car tout le monde a l’impression que tout a déjà été fait. Or, la rencontre amoureuse au restaurant et, de surcroît, éthique, n’a jamais été faite. Mais je dirais que le défi concurrentiel est l’apanage de l’entrepreneuriat. Le principal challenge est de débarquer avec des valeurs et une réelle envie de faire plaisir à nos membres sur un marché qui souffre d’une très mauvaise image. Quand on pense « site de rencontre » on pense « arnaque et frivolité ». On en oublie qu’à la base, un site de rencontre est là pour offrir de l’amour à ses membres (désolé pour cette phrase sortant tout droit d’un album de Lorie).
Cette mauvaise image est tellement présente que certains ne nous laissent même pas le bénéfice du doute. Lorsque nous avons eu l’idée d’incorporer les associations dans notre concept, nous avons tout de suite pensé aux Restos du Coeur (l’amour au restaurant et les Restos du coeur : le parallèle était évident). Nous avons donc contacté cette association qui n’a pas mis longtemps pour refuser notre aide, prétextant qu’elle ne collaborait pas avec les entreprises. Deux semaines plus tard, Les Restos du coeurs signait un partenariat avec Carrefour. Nous avons compris à ce moment là que l’aventure Meetserious s’annonçait être pleine d’embûches.
Quelle a été votre première réaction face à ce défi ?
Extrêmement déçu mais surtout très choqué qu’une association se permette de refuser une telle somme d’argent. Surtout quand cette dernière se plaint constamment de ne pas être soutenue. Il ne faut pas omettre que la place des associations dans le concept de Meetserious est loin d’être anecdotique. Nous reversons 10% de chaque addition à l’association du mois. Ce qui représente un tiers du chiffre d’affaire. Notre volonté de donner n’est en rien justifiée par un excès de zèle. Nous n’attendons rien des associations, nous donnons parce que nous pensons que cela est juste.
Comment avez-vous fait pour analyser la situation avant d’y faire face ?
Avec du recul, le refus des Restos du Coeur nous a été bénéfique. Cela nous a mis une claque ! Nous savions maintenant que certaines associations se comportaient comme la plus mercantile des entreprises. Cela nous a également obligé à revoir le concept et l’aspect éthique.
Quelles décisions avez-vous prises pour mettre en exécution des actions concrètes ?
Reverser des dons à une seule association était sûrement une erreur. Quitte à aider, autant donner à tout le monde. Nous avons pensé un système qui permettrait de contribuer financièrement à plusieurs projets tout en responsabilisant les célibataires inscrits sur Meetserious. Chaque mois, nous mettons en lumières trois associations. Ces dernières sont soumises aux votes de nos membres et l’heureuse élue empochera la cagnotte du mois. Les deux associations éconduites seront en lice les mois suivants pour qu’elles puissent aussi profiter du don. Nous espérons ainsi construire un véritable engouement en reposant sur une communauté solidaire et engagée.
De manière générale, nous avons pris conscience qu’il sera difficile de faire accepter aux célibataires qu’il existe aujourd’hui un site de rencontre qui s’est fondé dans l’unique but de satisfaire ses membres.
Quelle méthode avez-vous utilisée ?
L’empathie, tout simplement. Quand nos concurrents sont dotés de robots et font appel à des prestataires pour la relation clients, nous essayons autant que faire se peut, de répondre nous même aux questions que les membres nous posent. Nous essayons d’être réactifs et à l’écoute de leurs problèmes ou de leurs conseils. Comme dit plus haut, Meetserious s’est construit sur un objectif de satisfaction. Nous n’avons pas mis d’abonnement car nous jugeons que la rencontre ne devrait pas être payante, nous n’avons pas gonflé les prix des rendez-vous : le membre paie uniquement son menu et peut même parfois bénéficier de réductions. Nous concevons la relation entre une entreprise et ses clients comme une relation de couple : pour que cela fonctionne, il faut de la confiance, du respect et des petites attentions quotidiennes.
Qu’avez-vous retenu de cette situation aujourd’hui ?
Nous avons deux mois d’existence et les problèmes que je vous ai cités sont encore d’actualité. Même si nous avons pris du recul, cela nous étonne toujours autant quand une association refuse notre aide ou lorsque qu’un membre nous envoie un mail plein de doutes. On a envie de leur crier « Mais vous comprenez pas que l’on est sympa ?! »
Leur réaction est compréhensible, on n’a pas l’habitude de voir une entreprise tenant un discours comme le nôtre. Cela prendra du temps pour que notre sincérité soit comprise de tous, mais cela viendra.